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Bandes Originales Recommandées
Travelers – Adam Lastiwka
Le prolifique Adam Lastiwka a voulu faire quelque chose de futuriste, et c’est réussi. Prolifique, le canadien l’a été aussi sur les sonorités électroniques de cette bande-son qui en grouille littéralement. Mais pour dépeindre en musique les aventures de voyageurs temporels salvateurs Lastiwka garde tout de même un concept en surbrillance, l’emploi massif de la distortion même sur des instruments acoustiques, à tel point que ces derniers passeraient pour des synthés. Cela n’empêche pas au compositeur de mettre de la lisibilité dans son orchestration, posant des sonorités limpides pour contrebalancer des basses fréquences volontairement embrouillées et point contemporaines. Mais plus qu’un excellent sound design la BO de Travelers conserve une musicalité, discrète mais appréciable, quant certains morceaux par leurs rythmes haletants, affirmés ou non, nous maintiennent dans l’urgence ; car pour ces time travelers s’immiscer discrètement dans l’entourage d’un hôte demeure un combat de tous les instants.
Si Tu Voyais Son Cœur – Gabriel Yared
Cette BO symbolise quelque part le mal qui ronge le Cinéma français ces derniers temps, la musique originale y trouve de moins en moins sa place. Pourtant la réalisatrice Joan Chemla tenait en la personne de Gabriel Yared un excellent compositeur. Propulsé dans un projet taillé pour lui le franco-libanais a rappelé sur cette bande-son symphonique qu’il est un orchestrateur hors pair, tant l’orchestration de sa partition est limpide et pleine d’élégance. Un vrai régal qui est quelque peu modernisé par le choix d’une réverbe longue ajoutant une certaine intimité à la profondeur d’une flûte, à la fragilité du piano, et une certaine chaleur au mini-orchestre quand il se déploie mélancoliquement. Malheureusement, la BO est très courte, comptez 18 minutes, sur un film d’1 h 26… Dommage car la plume de Yared avait de quoi porter ce drame sentimental, psychologique, basé sur la rédemption, et jouer davantage avec la couleur de son contexte sombre.
Rappel
La Forme de L’eau – Alexandre Desplat (Golden Globes 2018 : les bonnes habitudes de Desplat, Pasek et Paul)
« …le français a réussi à se détacher en marquant les esprits par sa bande originale acidulée, nous emportant dans une féérie et un romantisme à toute épreuve… « Ce film traite de l’amour. Rien d’autre. Amour. Partage. Humanisme et respect. La musique devait transmettre cela », s’est-il exprimé après cette 75ème édition. C’est dans cette optique que ce flûtiste de formation a donné beaucoup de champ à différents timbres de bois, naturellement sensibles, sans même proposer un son imposant dans les scènes les plus brutales, l’absence de trompettes aidant. Ainsi l’idée de l’eau était autant présente à travers les mouvements incessants de la caméra que dans la puissance limitée d’un orchestre semblant constamment immergé, selon les dires du compositeur à billboard.com. »
Didier Bianay
bianaydidier.com